Dans le football d’aujourd’hui, les équipes donnent l’impression de reposer beaucoup sur des individualités que sur un esprit de groupe moins fort. Le constat peut être fait au RC Lens comme dans d’autres clubs.

Même s’il souligne que son groupe vit bien ensemble, l’entraîneur du RC Lens, Eric Sikora observe un football qui a beaucoup changé au fil des décennies. Le ballon rond épousant les nouvelles normes de la société en général, sans compter les conséquences de révolutions comme l’arrêt bosman ou l’explosion des droits TV :

« C’est l’évolution du football. L’arrêt bosman a fait que tu pouvais partir quand tu voulais ou presque. Les droits TV ont amené de l’argent et quand tu es entraîneur, tu prépares ton équipe sur un an voir 6 mois avec le mercato hivernal. A mon époque, l’entraîneur avait l’équipe sur 3 ou 4 ans. Les contrats étaient sur longue durée, tu ne pouvais pas partir comme ça. Aujourd’hui, tu n’as pas le temps de retravailler, il faut des résultats. Mais c’est l’évolution. Dans la société, c’est pareil. Quand tu parles avec des personnes qui font d’autres boulots, elles te disent que les jeunes n’ont plus envie, ce n’est pas que dans le foot. Tu dois t’adapter pour ne pas être le vieux con. Les mentalités ont changé. A nous aussi, dès le plus jeune âge, de faire comprendre qu’il y a des règles, du respect, que le RC Lens est un club à part, avec des valeurs. On parle d’éducation, moi j’ai été éduqué par mes parents, on me disait un truc, si je faisais de travers, j’allais dans ma chambre et je ne la ramenai pas. Attention, je ne dis pas que les parents sont tous fautifs mais avant aussi, on n’avait rien, on sortait jouer au foot à 4 ou 5, aujourd’hui, tu as les ordinateurs, internet, tout ce que tu veux et chacun vit dans son monde, à part, et tu n’arrives pas à créer un groupe. »

Autre évolution majeure, l’existence des réseaux sociaux, d’une médiatisation plus poussée et rapide qui expose plus les joueurs sur ce qu’ils font en dehors du terrain. Les Sang et Or ont d’ailleurs eu droit à une réunion d’information à ce sujet : « Il y a eu des réunions avec les groupes de joueurs, pour parler de tout ça, leur dire qu’il fallait être vigilant. On fait le boulot. Apres moi quand j’étais joueur, il n’y avait rien de ce qu’il y a aujourd’hui, tu étais tranquille. Mais on sortait après les matches en étant 7 ou 8 et alors tu créés des liens, tu rigoles et passe un bon moment. Le lendemain à l’entraînement, tu es reparti. Aujourd’hui, c’est chacun de son côté. Ils vivent bien ensemble, mais c’est chacun sa vie. Après, tu te dois d’être exigent en dehors. Mais ce n’est pas parce que tu manges un américain saucisse mayonnaise le mardi que ça va te poser des problèmes pour jouer tant que tu n’y vas pas tous les jours. Moi, je faisais un repas dans ma semaine où je ne faisais pas attention, ce n’est pas pour ça que je n’étais pas bon ou que je n’ai pas duré. Mais désormais, il y a les téléphones, il suffit que tu ailles une fois dans un endroit pour être catalogué comme si tu y allais tous les jours. Ça prend des proportions, c’est relaté, partagé, ça va partout. »

Propos recueillis par Christophe Schaad