L’osmose au sein du groupe du RC Lens est souvent mise en avant pour expliquer la qualité du début de saison. Manuel Perez, souvent remplaçant, incarne parfaitement cet état d’esprit, même s’il espère bien réussir à grappiller toujours plus de temps de jeu. Le milieu de 29 ans met notamment en avant la capacité de son entraîneur Franck Haise à mobiliser tout un effectif. Entretien.
Lensois.com : Manuel Perez, quel regard portez-vous sur ce début de saison marqué par 3 victoires en 4 matches et une vraie qualité dans le jeu, un bilan qui peut surprendre pour un promu ?
Sur le plan comptable, le début de saison est très positif. On travaille très bien tous les jours à l’entraînement. Chaque joueur est impliqué et fait le nécessaire. Que ce soit avant, pendant ou après les séances, on met beaucoup d’intensité dans le travail. On en récolte les fruits, mais on sait très bien qu’on est promus. On a pris des points mais ce n’est pas pour autant que l’on va changer notre fonctionnement et nous prendre pour des autres. On va juste continuer à travailler sereinement en espérant que les résultats continuent à venir.
On met beaucoup en avant l’unité du groupe, le fait que tout le monde est concerné. Est-ce quelque chose que vous ressentez tout particulièrement cette saison ?
Je suis complètement d’accord avec ça. Cette saison, il y a 5 changements autorisés lors des matches en raison du contexte du Covid-19 et c’est vrai que le coach essaye de faire participer un maximum de joueurs comme le montre le nombre de remplacements effectués lors des matches. Cela prouve qu’il a confiance en tout le monde. C’est agréable car on se sent concerné. On a tous envie d’être le plus performant possible pour ajouter sa pierre à l’édifice et aider l’équipe au mieux.
Les 5 changements, le Covid-19 qui peut vite rendre plusieurs joueurs indisponibles comme on l’a vu dans certaines équipes, ce sont des éléments qui s’ajoutent aux aléas habituels comme les suspensions ou les blessures. On a l’impression que le rôle des joueurs qui ont tendance à être plus souvent remplaçants et la notion de groupe n’ont jamais été aussi importants que cette saison…
Clairement. Cette saison, il faut que tous les joueurs soient prêts et vigilants. Il y a le Covid, les blessures et ces 5 changements. Quand la saison dernière, nous ne pouvions être que 18 sur la feuille de match pour 3 changements, aujourd’hui on est 20 convoqués pour 5 changements… Il faut se tenir prêt pour le week-end. Cela concerne un maximum de joueurs. On voit aussi que les jeunes peuvent en profiter. En général, ce n’est pas évident pour eux de commencer en pro faute d’expérience, mais on voit avec le petit Ismaël Boura qu’il a pu se montrer performant quand on a fait appel à lui. Un autre jour ce sera David (Pereira Da Costa) ou Adam (Oudjani), tous ces jeunes qui ont du talent et qui travaillent très bien toute la semaine. Même eux savent qu’ils doivent se tenir prêts et c’est vraiment une bonne chose.
Depuis l’arrivée de Franck Haise, votre situation semble avoir un peu évolué. Il a modifié le milieu pour aligner Cheick Doucouré plutôt que Guillaume Gillet aux côtés de Yannick Cahuzac et lorsqu’il a eu besoin d’effectuer un changement dans l’entrejeu lors des 2 matches de Ligue 2, vous avez été le premier à entrer. Cette saison, il n’a pas hésité à vous aligner aussi contre le PSG… Malgré ce statut de remplaçant régulier, il semble y avoir une marque de confiance de sa part à votre égard depuis le début. Quelle est votre relation avec lui ?
On a beaucoup de respect l’un envers l’autre en tant qu’hommes, mais aussi en tant que coach et joueur. Je lui ai déjà dit que j’appréciais ses méthodes de travail et ses idées. Il le sait. Forcément, je me sens plus concerné que pendant quelques mois la saison dernière durant laquelle ça devenait pas facile sur le plan personnel. Quand le coach Franck Haise est arrivé, je me suis retrouvé dans ses idées. J’aime le football tel qu’il le propose. La clé pour un coach est de réussir à piquer la curiosité de l’ensemble des joueurs tous les jours. Avec son staff, on ne peut pas dire qu’on s’ennuie à l’entraînement, au contraire. Toutes les séances ont du sens, c’est comme ça qu’on va avancer.
« Lens en Ligue 2, c’est déjà particulier, alors en Ligue 1, c’est les yeux fermés. Il faut foncer. »
Vous vous sentez donc valorisé malgré votre situation de remplaçant régulier ?
Bien sûr. Après je l’ai toujours dit, pour moi l’important c’est l’équipe avant tout. A titre personnel, j’ai envie de gratter le plus de temps de jeu possible car je suis compétiteur, j’ai envie de jouer tout le temps. Je vais tout mettre en œuvre pour répondre présent quand on fera appel à moi et apporter des réponses, des satisfactions. Mais l’essentiel, c’est d’arriver à avancer tous ensemble.
Comme vous l’expliquez, vous avez toujours cette envie de vous battre pour une place, mais quand cette situation dure, est-ce que l’on ne peut pas finir par accepter ce statut de remplaçant, à le prendre comme un rôle en soi ?
Je ne peux pas dire qu’on accepte ce statut de remplaçant déjà parce que la saison est très longue. Souvent l’équipe qui commence les premières journées n’est pas la même que celle qui termine. Aujourd’hui, c’est vrai que je suis remplaçant, mais je travaille, je suis patient avec l’envie de faire bouger les choses. Il n’y a que moi, à travers mon investissement et mes performances qui peux réussir à mettre le doute dans la tête du coach. Je ne commence pas la saison en me disant que je vais être remplaçant jusqu’au bout. Pas seulement parce qu’il y a les risques du Covid-19 ou les blessures, mais surtout parce qu’on a un coach qui concerne un maximum de monde. Ça, pour tous les joueurs, ça donne envie d’aller chercher toujours plus.
Quand Lens était en Ligue 2, des joueurs qui auraient pu évoluer en Ligue 1 déclaraient qu’il était préférable pour eux d’évoluer au Racing dans l’antichambre plutôt que dans l’élite au sein d’un club qui fait peut-être moins rêver. A cette étape de votre carrière, avez-vous le sentiment d’avoir plus à gagner de cette saison au RC Lens, même dans votre situation actuelle, qu’en tant que titulaire à l’étage en dessous ?
La Ligue 2, je connais, c’est ma première saison de Ligue 1. Forcément en tant que joueur de foot, j’aspire à jouer au plus haut niveau. Aujourd’hui j’y suis, maintenant le chemin est encore long pour être un bon petit joueur de Ligue 1. Il faut travailler pour ça. Ce qui est dommage c’est qu’avec le contexte sanitaire actuel, on n’évolue pas dans l’élite avec le Bollaert que l’on connait, plein à craquer. Ça… c’est vraiment quelque chose ! En 2014 j’ai joué avec Brest l’avant-dernier match de la saison à Bollaert. Lens devait prendre un point pour monter. Malheureusement pour le Racing, on a gagné, mais il y avait 42 000 personnes au stade, ça m’a marqué, j’en ai un très bon souvenir. C’est ça qui a fait aussi que j’avais envie de rejoindre ce projet. Lens en Ligue 2 c’est déjà particulier alors en Ligue 1, c’est les yeux fermés. Il faut foncer.
Du coup malgré votre dernière saison, la question de votre avenir ne s’est jamais posée cet été ?
J’avais envie de découvrir la Ligue 1. J’ai envie de jouer aussi forcément, comme tous les joueurs, mais découvrir la Ligue 1 avec le RC Lens, ça a une autre saveur qu’avec un autre club. J’ai maintenant hâte que le Covid soit derrière nous, que les spectateurs puissent revenir au stade parce que Bollaert plein à chaque match, ça fait envie. Mais avec 5 000, déjà, c’est fou ! Il y a forcément un peu de frustration de ne pas avoir tout le public habituel derrière nous. C’est un véritable atout de l’avoir avec nous. Bollaert, ça fait beaucoup de bruit, c’est une ambiance particulière. Mais avec 5 000, on avait l’impression qu’ils étaient 15 000 ou 20 000. Je suis persuadé que dans les autres stades en France, avec 5 000 personnes ça ne rend pas comme ici. On se sent vraiment poussé quand même, on arrive encore à ressentir toute cette passion !
Propos recueillis par Christophe Schaad