Alain Casanova parle d’un « échec personnel ». Le président du RC Lens Gervais Martel l’a vite conforté vendredi soir, regrettant de ne pas avoir pu assez mettre assez vite l’effectif nécessaire à sa disposition. Si le club semble disposé à continuer avec lui, qu’en est-il de l’intéressé, instigateur de l’objectif de montée dès cette saison alors que les actionnaires étaient prêts à patienter 2 ans ? Le technicien n’est pas du tout du genre à se laisser abattre, mais s’il repart pour un an, il devra composer avec une défiance accrue des supporters.

Samedi, nous vous avons demandé quelle était la raison de l’échec du RC Lens selon vous. Vous avez été 46% à répondre une mauvaise gestion du staff sur plus de 2 000 votants. Mais donc plus de la moitié à estimer que le premier problème venait d’ailleurs (qualité de l’effectif, recrutement trop tardif, manque de réussite…). Lundi, lorsque nous vous avons demandé si selon-vous l’aventure peut continuer entre le RC Lens et le coach, vous avez tout de même été 66% à estimer que non. Vendredi soir, avant le match contre Niort, le nom d’Alain Casanova a été le seul à déclencher quelques sifflets lors de l’annonce des équipes. Une constante depuis de nombreux mois.

Que reprocher au staff lensois qui a vu son équipe, malgré des moyens suffisants et un environnement de travail meilleur que n’importe où ailleurs en Ligue 2 être devancé par 2 clubs promus de National ? Il y a forcément eu des erreurs à différents étages. Le Racing n’est que 5e à domicile et au regard du soutien à domicile, cela ne peut qu’interloquer. Le discours porté sur la galvanisation de l’adversaire a eu un peu de mal à passer, il suffit de passer 5 minutes sur les réseaux sociaux pour se convaincre qu’il s’agit de l’un des principaux points d’accrochage entre les supporters et le discours. Pourtant, il est loin d’avoir tout raté. Dans le jeu, son équipe a été souvent largement dominatrice, de façon parfois impressionnante. Il a su créer une réelle cohésion de groupe malgré un nombre de mouvements particulièrement (trop ?) important, certains nés de départs pas des plus simples à compenser comme ceux de Wylan Cyrpien ou Jean-Philippe Gbamin et la globalité de son groupe était derrière lui, notamment les cadres.

Un projet fort très vite contrarié

Bien sûr, il y a eu des mécontents. Teddy Chevalier par exemple, parti à Courtrai en janvier, d’abord très efficace en Belgique avant de rentrer dans le rang, n’a pas franchement apprécié d’être sorti des plans aussi vite. On pourra aussi toujours revenir sur d’autres cas. John Bostock était indiscutable durant la phase aller, l’était-il toujours tant que ça après janvier ? Abdellah Zoubir n’aurait-il pas eu besoin de souffler plus à certains moments ? Abdoul Ba, qui a bien rendu service en fin de saison, n’aurait-il pas pu être plus impliqué sur la fin de saison même s’il a été proche d’un départ ? Autant de questions qui reviennent souvent dans les conversations. Le cas de Loïck Landre, capitaine mis de côté suite à ses envies de départ puis l’éclosion de Jean-Kévin Duverne est souvent évoqué également, même si l’on rappellera que le joueur, déjà partant il y a un an, avait mis 6 bons mois avant de se remettre sur les rails et de revenir au niveau suffisant pour retrouver véritablement grâce aux yeux d’Antoine Kombouaré.

Mais Alain Casanova, c’est aussi un entraîneur dont les plans ont été très vite contrariés. Il était arrivé avec une idée forte : faire jouer son équipe et les autres formations du club en 3-5-2, un système à part. L’intégralité de la préparation a été effectuée avec ce projet en tête. Il a volé en éclat lorsque début août, Dusan Cvetinovic et Mohamed Fofana se blessent pratiquement en même temps, alors que Loïck Landre se retrouve mis de côté suite à ses envies d’ailleurs. Autrement dit, l’intégralité de la défense potentiellement titulaire dans ce système qui nécessite du temps de jeu en commun pour l’assimiler est brisée. Heureusement, il est facile de s’adapter à des systèmes plus classiques à 4 derrière et ses joueurs peuvent vite y trouver des automatismes et leurs aises, même si les premiers matches dans cette configuration ne sont pas tous franchement convaincants. Il est alors difficile de revenir en arrière. Au final, c’est dans cette configuration que le RCL a pu se mêler à la lutte tout en conservant sa philosophie principale basée sur la possession. Mais affirmer aujourd’hui que le Racing n’aurait pas au moins autant performé en pouvant poursuivre ses plans tactiques initiaux reste hasardeux. On retient juste qu’Alain Casanova n’a finalement pas mis en place ce qu’il avait préparé durant de précieuses semaines. Il n’a pas souhaité ou pas pu insister dans cette voie particulière, à tort, à raison, on ne le saura jamais, la seule certitude étant que ses plans ont été bousculés. Vient enfin un mercato effectivement achevé trop tard particulièrement pour un poste clé : celui d’avant-centre. Cristian Lopez, 16 buts, est un profil particulièrement efficace difficile à trouver et qui manquait au Racing la saison précédente. Le joueur n’a pu commencer à s’installer que courant septembre, soit un mois et demi après le début de la compétition. Ça n’aurait peut-être pas tout changé, mais s’il avait été là dès la préparation, le mois d’août aurait peut-être ramené ces 2 ou 3 petits points qui ont manqué. Le RC Lens en a perdu bien d’autres bêtement par la suite, mais ceux là ont compté aussi. Maintenant, presque tout semble à refaire. Avec ou sans Alain Casanova, cette fois, il faudra faire plus vite.

Christophe Schaad