L’entraîneur du RC Lens Alain Casanova et ses joueurs ont connu une sortie agitée à Orléans, lundi, après leur défaite 2-1 (26e journée de Ligue 2), alors qu’ils étaient attendus par une poignée de supporters en colère. Le technicien revient sur la relation actuelle avec le public et espère que son équipe bénéficiera du soutien de tout le monde.

Lensois.com : Alain Casanova, comment avez-vous vécu la sortie du stade à Orléans ?
Comme l’a dit le président, qui est là depuis 30 ans et le sait mieux que moi, il y a aussi des choses qui sont inexcusables. Il faut avoir à l’esprit ce que je dis depuis toujours, c’est-à-dire que nous avons un objectif et que la route est encore longue. Il n’est pas question de se mettre une balle dans le pied. Aujourd’hui, si nous voulons monter, ce sera avec les joueurs, les supporters, tout le monde. On voit bien que dans ce championnat, mis à part pour Brest qui a quelques points d’avance, il y a beaucoup d’irrégularité, un manque de constance. Les 5 équipes en tête ont un minimum de 6 défaites, cela montre que c’est difficile pour tout le monde. Je ne cherche pas d’excuses, je sais très bien que nous devions mieux faire à Orléans, que nous devons mieux faire à l’avenir, mais il faut être capable de garder notre stabilité, notre sérénité, être capable de se remettre en question. Nous le faisons. La pression, je n’ai pas attendu qu’on me la mette. Je suis assez grand pour le faire tout seul. A mon arrivée, on m’a donné 2 ans pour monter, avec un contrat de la même durée. 5 minutes après, c’est moi le premier qui annonce vouloir monter cette année. Quand je l’annonce, j’ai encore des joueurs dans l’effectif qui sont partis et qui étaient importants : Wylan Cyprien  qui devient l’un des meilleurs joueurs de Ligue 1 et Jean-Philippe Gbamin qui fait quelque chose de grand en Allemagne. Malgré ça, j’ai toujours annoncé que je voulais monter parce que club le mérite, parce que l’ambition doit être de monter quand on arrive dans ce club. Je me mets la pression tout seul, mais elle est positive. Je ne veux pas d’une pression négative, ni sur mes épaules, ni sur celles de mes joueurs. Il nous reste 12 matches, dont 7 à domicile. Nous jouerons 3 fois à Bollaert sur les 4 dernières journées. Rendez-vous compte si nous avons l’appui de tout le monde, c’est-à-dire des joueurs à 100%, un staff à 100%, des dirigeants à 100%, un public à 100%, une région à 100%… On se donnera les moyens de monter car personne ne sera capable de nous battre à Bollaert. Si par contre, la pression est négative, alors tout peut se passer. Je le dis depuis toujours, il faut être stable, serein, déterminé dans le travail, être encore plus juste, impliqué, concentré et les choses se feront naturellement. Je ne dérive pas. J’ai une grande croyance en cette équipe.

Avez-vous l’impression que certains vous voient plus beaux que vous ne pouvez l’être ?
Nous n’avons jamais dit que nous allions survoler la Ligue 2. Nous avons montré une qualité de jeu depuis le début grâce à une progression qui s’est faite car les joueurs ont beaucoup travaillé. Il y a une qualité de jeu indéniable. Nous avons sûrement l’équipe qui a le plus de possession et peut-être qui se procure le plus d’occasions. Malheureusement, nous ne sommes pas assez réalistes. Les gens ont peut-être pensé à un moment que nous allions survoler cette Ligue 2, mais un projet ne se met pas en place du jour au lendemain. L’intégration de 14 joueurs ne se fait pas en claquant des doigts. Il y a des adversaires et tous les matches sont difficiles, d’autant plus dans cette 2e partie de saison car tout le monde a quelque chose à jouer. Orléans jouait sa survie, ce n’est pas rien. Nous affrontons des équipes qui montrent de la qualité, de l’engagement. Aucun match ne sera facile. Après 8 journées, nous étions 11es et ce n’était pas simple. Il a fallu revenir dans la course. Combien d’équipes aimeraient être à notre place aujourd’hui ? Des équipes ont eu des dynamiques un peu négatives comme ce fut le cas de Brest, de Reims, de Sochaux, du Havre… Mais ces équipes savent qu’elles doivent rester unies, qu’il faut faire le dos rond, continuer à travailler et que les choses rentreront dans l’ordre si la force collective est de mise. Et surtout ne pas se tirer des balles dans le pied comme on peut parfois l’imaginer ici.

« Ce n’est plus de l’exigence quand ça devient de l’agressivité, de l’insulte, de la menace… »

L’appel au calme sera-t-il selon vous entendu ou craignez vous l’accueil de samedi ?
Que les gens soient avec nous, ce serait la meilleure des choses, mais si ce n’est pas le cas, nous allons tout de même tout faire pour monter. Je suis persuadé que nous monterons. Je crois énormément en cette équipe et il faudrait que tout le monde croie plus en elle. Après Tours, où on gagne de façon un peu miraculeuse, j’avais l’impression que nous étions déjà en Ligue 1, mais les bilans se font en fin de saison. Ce n’est pas en gagnant 2 matches que nous serons en Ligue 1 et ce n’est pas en faisant une série de matches pas aussi positive que nous le souhaiterions que nous sommes déjà condamnés. Gardons de la mesure, de la détermination, de la sérénité. Je ne veux pas perdre de l’énergie par rapport à tout ça. Je n’ai qu’un objectif : améliorer l’équipe, être plus efficace et emmener ces joueurs sur le plan mental à être les compétiteurs qu’il faudra pour mener à bien l‘objectif.

Vous attendiez-vous à ce qu’une partie du public puisse afficher une telle exigence ?
Mais bien sûr que je m’attendais à ce qu’il puisse y avoir une telle exigence. Mais après il y a exigence et exigence. Ce n’est plus de l’exigence quand ça devient de l’agressivité, de l’insulte, de la menace. On ne parle que de football. Je l’ai dit en arrivant : ce club fait partie des 10 plus grands de France. Le public fait surement partie des 3 meilleurs du pays, mais en même temps je sais qu’il y a une attente énorme vis-à-vis de la Ligue 1, une impatience énorme, que les gens n’ont plus envie de rester en Ligue 2. Mais justement, il faut rester lucide et tout mettre en œuvre pour que les joueurs soient soutenus, sentent un appui qui va les aider à survoler les obstacles et atteindre les objectifs.

Le groupe a-t-il le tempérament suffisant pour aller au-delà de cette tension ?
Je ne veux pas faire d’amalgame. Cette impatience est peut-être encore plus caractérisée par une petite frange. J’ai assez d’expérience pour savoir que parfois, il peut y avoir certains débordements regrettés par ceux qui les commettent. Mais je pense qu’une grande partie du public est avec l’équipe, et l’autre partie l’est quand les choses vont bien. Quand elles vont moins bien, j’ai l’impression que les émotions sont difficiles à gérer. Notre groupe est costaud, décidé à tout faire pour monter, mais l’équipe a besoin de l’appui de tout le monde. Les équipes qui viennent à Bollaert ont une crainte, c’est ce public et il faut que ça continue, que les adversaires ne pensent pas à faire vite changer le soutien et que cela se retourne contre le RC Lens. Le public doit être totalement dévoué à notre cause. Je ne peux pas garantir qu’on gagnera tous nos matches, mais que nous mettrons tout en œuvre pour les remporter en essayant de produire du jeu, en ayant une grande détermination, en mouillant le maillot. Ça, jusqu’à maintenant, personne ne peut le condamner, le critiquer. L’équipe a toujours cherché à mettre beaucoup d‘efforts dans ce qu’elle faisait pour gagner les matches.

Propos recueillis par Christophe Schaad