Entré au RC Lens pour s’occuper du service juridique du club puis secrétaire général, Gauthier Ganaye a quitté l’Artois l’été dernier pour diriger Barnsley. Ce club évolue en Championship, la 2e division anglaise.

Il est le premier français à diriger un club anglais et le plus jeune aussi. C’est auprès de Gervais Martel qu’il est entré dans le football. Il raconte longuement :

« Avocat, notaire, dans le même bureau pour les quarante prochaines années, ça ne me faisait pas vibrer plus que ça. Au début, j’obtiens un rendez-vous avec Gervais Martel pour qu’il m’aide à être agent. Il me fait : «?Mouais, les agents… c’est un milieu de merde, mais nous, on n’a pas de service juridique, et on dépense beaucoup trop en honoraires d’avocat.?» Les chiffres étaient astronomiques. Il me prend en stage de 3 mois, pour ma 2e année de fac. Super. J’en refais un de 6 mois en 5e année. En parallèle, je rédige mon mémoire de fin d’études sur la compétitivité du foot français. Et Gervais veut m’embaucher en tant que responsable du service juridique, mais la fac veut que je finisse mon stage d’abord. Et là, cataclysme : le Crédit Agricole prend la majorité du RC Lens et Gervais devient minoritaire, donc plus décisionnaire complètement. Un directeur général, genre cost killer d’une soixantaine d’années, arrive, me rencontre à la demande de Gervais. Je lui explique le projet de service juridique et il me fait : «?Tout ce que tu viens de m’expliquer est exactement ce qu’il faut faire, mais t’as pas l’expérience pour.?» 2 jours après, la directrice du service juridique de l’Institut Pasteur de Lille  me propose un entretien. Finalement, je réalise qu’elle me propose son poste parce qu’elle part diriger le service juridique du… RC Lens. Moi, je me retrouve sans job jusqu’à ce que Gervais m’appelle : «?Écoute, je vais retrouver des investisseurs et reprendre le club, dans un mois pas plus, j’ai besoin de ton expertise pour faire les présentations, les montages juridiques, tout ça.?» Ça a duré un an pile. Une aventure humaine intense. Gervais n’avait plus grand monde autour de lui à ce moment-là. Beaucoup l’enterraient. Je me rappelle notamment d’un moment où, après un rendez-vous avec une banque, il pose sa mallette sur le trottoir, s’allume une clope et me dit : «?Je te remercie beaucoup de faire ça avec moi.?» T’apprends très vite, à 24 ans, quand tu partages une grande partie de son quotidien. On fait plein de rendez-vous, face à des types carrés, d’autres moins, à 4 heures du mat parfois. Une fois, on est même arrivés en retard à une banque parce qu’un supporter lensois croisé dans la rue à Paris voulait prendre un café avec Gervais. «?Pfff, c’est les banquiers, ils attendront, y a plus important?» disait Gervais. Et on est resté 15 minutes à discuter autour d’un café. Vers décembre-janvier, on sait que Mammadov va être le futur repreneur. Je pars de mon côté apprendre l’anglais pour six mois à Leeds, tout en bossant à distance pour Gervais. Leeds, c’est pas Londres hein, tu croises pas beaucoup de Français. Là, je parle anglais avec mes colocs, dans mes sorties, dans mes rencontres. Puis l’arrivée de Mammadov se précise, et je rentre à Lens, en juillet 2013, comme Gervais Martel. Je remplace au service juridique la femme qui venait de Pasteur ! Elle avait très bien fait le boulot, mais en revanche, elle ne s’était pas intéressée au cœur de métier d’un club de foot : contrats de transfert, des joueurs, entraîneurs… Donc je me mets là-dessus. Pour l’anecdote, quand je suis arrivé à Lens, un contrat de joueur faisait 5 lignes. Durée, montant et point barre. (Rires.) Maintenant, il fait 15 pages. Et puis comme Lens a un gros centre de formation, tu as aussi le volet lié au mécanisme de solidarité FIFA pour les transferts de tes anciens joueurs à l’étranger. Là, je commence à me tisser un réseau plus international, à participer à toutes les négos. Et ça me permet de pratiquer l’anglais appris à Leeds. »

(Source : So Foot)