Cette semaine, on voit se terminer des séries de matches internationaux dont beaucoup peuvent sembler futiles dans une année 2022 aussi spéciale. Ils ont pourtant amené leur lots de blessure, de coups de fatigue apparents et le RC Lens n’a pas été épargné. De quoi s’agacer.

Joueur international polonais du RC Lens, Przemyslaw Frankowski va pouvoir partir en vacances. Enfin, pourrait-on dire. Car mardi, en entrant en jeu lors de Pologne-Belgique (0-1), l’ex joueur du Chicago Fire arrivé l’été dernier en Artois a joué son 60e match depuis juin 2021. Certes, être transféré d’un championnat organisé sur des années civiles comme la MLS vers une Ligue européenne engendre toujours des cas particuliers. Mais entre la compétition nord-américaine, l’Euro, la Ligue 1, les éliminatoires de la Coupe du monde et pour finir la encore récente Ligue des Nations, le piston a eu un emploi du temps terriblement chargé. Le RC Lens a fait au mieux pour le gérer au cours de la saison. Difficile de le savoir, mais peut-être que cette gestion a permis d’éviter à « Franckie »  une vilaine blessure en juin. Une blessure comme celle subie par Adam Buksa (cheville), son coéquipier en sélection et son futur partenaire au RC Lens, qui va devrait manquer 8 semaines soit la préparation des Sang et Or. Ou comme celle subie avec le Venezuela entre 2 matches amicaux en Europe par Wuilker Farinez, dont un ligament croisé du genou gauche a lâché, le privant de compétition avec le Racing probablement jusqu’à l’hiver minimum. Le gardien n’a peut-être pas autant joué que Przemyslaw Frankowski cette saison, mais il a aussi beaucoup voyagé avec des cadences importantes pour assumer le calendrier intense cette année des éliminatoires du Mondial en zone sud-américaine.

Alors on pourra toujours discuter des raisons, parler d’un simple concours de circonstance, du mauvais coup reçu au mauvais moment. Difficile tout de même de ne pas se questionner sur ces matches internationaux de fin de saison, certes traditionnels mais qui sont intervenus au cœur d’une année spéciale et qui restent, fatigue ou non, autant d’occasions de se blesser en plus. Des rencontres qui sont venues pourrir aujourd’hui le début de saison du RC Lens mais aussi probablement d’autres clubs. Si on peut entendre la volonté de la Fédération vénézuélienne d’organiser 2 matches amicaux en Europe alors que son équipe ne jouera pas le Mondial, que dire de l’UEFA ? La Ligue des Nations venait initialement remplacer les matches amicaux, donner un peu plus d’attrait aux dates FIFA sans enjeu. Mais parce qu’il faut absolument tout rentrer dans un calendrier annuel qui ne comptera toujours que 365 jours, on s’est retrouvé avec des sélections européennes qui ont joué l’équivalent d’une phase de poules d’un Euro ou d’une Coupe du monde, dans des contextes sous pression de matches officiels, immédiatement à l’issue d’une saison  chargée pour de nombreux joueurs. Combien de joueurs sont apparus sur les rotules ou se sont blessés lors de ces rencontres ? Chez les Bleus, on a assisté rapidement à une succession de pépins. Etait-ce vraiment indispensable une année où la Coupe du monde viendra interrompre la fin de l’année sur novembre-décembre ? On s’interroge aussi pour les footballeurs internationaux africains, dont certains jouent à Lens (Ganago, Wooh…), qui ont joué des éliminatoires de CAN en ce mois de juin, qui participeront peut-être au Mondial cet hiver au milieu de leur saison en club et qui, en cas de qualification, devront enchainer par la phase finale de la Coupe d’Afrique des Nations. Délirant, surtout qu’il y a encore des éliminatoires à disputer dans la saison.

A Lens, on peut se féliciter de compter toujours plus d’internationaux, mais on en vient à se dire égoïstement que ce n’est peut-être pas forcément un mal pour le club si certains (Berg, Clauss, Frankowski…) ont si peu joué pendant les rassemblements de juin…  Ces dernières semaines, la FIFPro (syndicat international des joueurs) comme l’UNFP (syndicat français des joueurs) ont commenté une étude attirant l’attention sur la cadence folle imposée aux joueurs, qui certes ne sont pas les personnes les plus à plaindre du monde mais restent des humains, avec leurs failles, leurs moments de fatigue et un corps que l’on présente souvent comme une machine de précision qui, comme toute machine, peut casser. Et on s’aperçoit, avec l’exemple de Przemyslaw Frankowski parmi d’autres, qu’il n’y a pas besoin d’être un joueur du Real Madrid qui va jusqu’en finale de la Ligue des Champions pour être concerné par cette limite de 55 matches dans le collimateur de ces études. Le week-end du 6-7 août va se lancer une saison très spéciale en France, avec cette coupe du monde plantée en plein milieu, et une réduction en fin d’exercice à 18 clubs. Espérons que le fracas se limite aux descentes des clubs et que les Lensois seront épargnés par les coups du sort. Les préparateurs physiques vont avoir du travail pour aider les joueurs concernés à digérer la saison écoulée et les mettre sur les bons rails pour la prochaine. A un moment, il va falloir revenir à la raison, mais bien que la Ligue 1 va se réduire à 18 clubs, on en voit déjà certains arriver avec leurs gros sabots (la FIFA, l’UEFA poussée par les plus gros clubs qui veulent toujours plus de droits tv en dépit du bon sens) et leur tentative d’instaurer un Mondial tous les 2 ans ou une Ligue des Champions qui comptera toujours plus de matches dans une nouvelle formule en 2024 (189 contre 125…). On aura l’occasion d’en rediscuter quand Lens se sera qualifié pour la C1.

Christophe Schaad